Hora fugit - Un peu de Paris
L’enceinte débutait en face du pont des Arts, sur l’actuel quai François Mitterrand.
L’abord de la Seine était défendu par la tour du Coin et par la Forteresse du Louvre située alors à l’ouest de l’actuelle cour Carrée. Edifié à l’extérieur de la muraille, ce château fort était lui-même défendu par une enceinte dotée de dix tours et par un donjon pouvant servir aussi de prison et de coffre fort pour le trésor royal.
De caractère uniquement défensif, il ne devint résidence royale que vers 1360, lorsque Charles V décida de le transformer en un somptueux château. Jusqu’à cette date, le Palais de l’ïle de la Cité resta la résidence royale.
Difficile même avec beaucoup d’imagination de se figurer cet ensemble fortifié. Il faut plonger dans les profondeurs du Louvre sous l’actuel Pavillon de Sully pour s’en faire une idée.
Les fondations de la forteresse dégagées avec le chantier du Grand Louvre des années 80 sont impressionnantes. La visite permet aussi de bien comprendre l’évolution du Louvre fort bien illustrée par de courtes vidéos.
L’enceinte traversait l’actuelle cour Carrée du Louvre, puis bifurquait dans l’axe de l’actuel Temple Protestant de l’Oratoire, construit à cheval sur l’ancien tracé de la muraille.
En suivant la rue de l’Oratoire, nous nous trouvons sur l’ancien chemin de ronde intra-muros de l’enceinte dont des vestiges sont encore visibles dans le sous-sol de la sacristie du Temple.
La rue Saint-Honoré, alors une des artères les plus passantes de ce Paris médiéval s’arrêtait au niveau du n° 148 où se dressait la porte fortifiée Saint-Honoré. A partir de là, la muraille s'infléchissait légèrement vers le nord-est; Les hautes cheminées blanches des immeubles construits plus tard sur le tracé de l'enceinte en ont gardé l'orientation.
Prenons la rue du Louvre à gauche.
Au niveau du n° 11, on peut voir l’empreinte intérieure d’une tour de l’ancienne muraille. Renfoncée dans son coin de mur, elle attire peu les regards des passants pressés ou juste blasés. Tout au plus, ils ont dû me prendre pour une employée de la maintenance de la RATP lorsqu’à travers la grille, j’observais et photographiais la base bien visible de la tour.
L’enceinte continuait en direction de l’actuelle Bourse du Commerce-Collection Pinault, superbemement restaurée. De l’enceinte, plus aucun vestige évidemment.
Quand je suis passée lors de la belle exposition de Charles Ray, mon imagination tout aussi débridée que le cheval de la statue Horse and Rider m’a toutefois fait entrevoir à la place du lonely cow boy un chevalier médiéval à l’armure rutilante prêt à franchir la poterne Coquillier.
Prenons à droite la rue Coquillière puis la rue du Jour qui est un ancien chemin de ronde intérieur de l’enceinte qui passait entre cette rue et l’actuelle rue Jean-Jacques Rousseau. Des vestiges de l’enceinte sont encore visibles dans quelques cours d’immeubles et au sous-sol de la caserne des pompiers.
Nous débouchons rue Montmartre que nous prenons sur sa gauche pour rejoindre la rue Etienne-Marcel où nous nous arrêterons à la tour Jean sans Peur.
Cette tour, construite plus tard en 1408 était adossée à l’enceinte de Philippe Auguste, dont on peut voir encore quelques vestiges.
Tout Jean sans Peur qu’il était, le duc de Bourgogne pouvait craindre à raison de la vengeance des partisans de Charles VI pour avoir organisé en 1407 l’assassinat de son cousin Louis d’Orléans, frère du roi.
Le Duc de Bourgogne était partisan de la paix avec l’Angleterre pour des raisons économiques. Hostile à Louis d’Orléans qui était en faveur de reprendre la guerre pour récupérer les territoires occupés par l’Angleterre, il décida de l’éliminer. Après quoi, afin de renforcer sa protection, le Duc de Bourgogne se fit construire une tour fortifiée au centre de sa résidence principale, un vieil hôtel de 1270 lui-même traversé par la muraille de Philippe Auguste.
Outre cette tour, en cas de danger immédiat, Jean Sans Peur pouvait aussi s’éclipser par des passages dérobés sous l’ancienne enceinte. A l’époque de Jean Sans Peur, la muraille de Philippe Auguste était déjà déclassée depuis belle lurette et les anciens espaces autrefois à l’extérieur de ses portes étaient désormais inclus dans le Paris du XVème siècle.
Si la muraille n’avait donc plus de rôle défensif pour Paris, elle assurait cependant une réelle protection de l’hôtel de Bourgogne, complétée par une ancienne tour ronde que l’on peut encore voir à l’intérieur du musée.
Le parcours du petit musée très didactique retrace la guerre de Cent ans ainsi que l’affrontement entre les Ducs de Bourgogne et la couronne. Il permet également de voir un joyau de la sculpture médiévale. L’escalier à vis qui dessert les salles de la Tour au dernier étage devient un prodigieux arbre dont la délicate voûte végétale recouvre tout le plafond.
En sortant du musée, continuons par la rue Etienne-Marcel jusqu’à la rue Saint-Denis où à hauteur de l’actuel n° 135 se trouvait la porte Saint-Denis, dite porte aux Peintres.
Le tracé urbain a conservé le chemin de ronde extérieur de l’enceinte marqué aujourd’hui par l’impasse des Peintres, étroite et courte trouée rectiligne entre les immeubles, tels deux parts de gâteau bien tranchées.
Suite de la promenade - du Marais à l'Ile saint-Louis
Texte / Photos : Martine Combes
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