Paris Médiéval - Rive Droite

Itinéraire

Au cours de cette promenade, nous nous arrêtons plus particulièrement:

Rue du Grenier-sur-l’Eau
13, rue François-Miron
L’Hôtel de Sens
Rue des Jardins-Saint-Paul
Rue du Prévôt
Cloître des Billettes
Hôtel de Clisson
 3, Rue Volta
 Maison de Nicolas Flamel
 Prieuré de Saint-Martin-des-Champs

Promenade vieux Paris médiéval rive droite itinéraire détaillé

Rue du Grenier-sur-l'Eau

Venant de la rue du Pont Louis- Philippe, arrêtons-nous rue du Grenier sur l'Eau. 
A l’angle de la rue des Barres et de la rue du Grenier-sur-l’Eau, la maison à colombages et pignon, probablement du XVIIème siècle nous transporte dans un  Paris moyenâgeux, dont l’aspect est renforcé par le caniveau central au milieu des pavés.

Du temps d’Atget, la rue était plus étroite et l’encorbellement de la vieille maison touchait presque l’immeuble  d’en face, abattu en 1943.

En 2000, la partie orientale de la rue (entre la rue du Pont-Louis-Philippe et la rue Geoffroy-l’Asnier), a été rebaptisée allée des-Justes-de-France, en hommage aux hommes et femmes qui, au péril de leur vie, sauvèrent des Juifs durant la guerre de 1939-1945. On peut lire leurs noms inscrits  en 2006 sur le mur d’enceinte du Mémorial de la Shoah situé tout près au 17, rue Geoffroy-l’Asnier.

Rejoignons le rue François-Mirron par la rue des Barres à droite.


Rue du Grenier sur l'Eau
rue du Grenier sur l'eau Atget

Rue du Grenier-sur- l’Eau
Atget - 1899
(Musée Carnavalet)

13, rue François-Miron

« Car c’est une des différences radicales des villes d’alors et des villes d’à présent, qu’aujourd’hui ce sont les façades qui regardent les places et les rues, et qu’alors c’étaient les pignons. »
Notre-Dame de Paris - Victor Hugo

En 1667, pour des raisons de sécurité, les pignons furent en effet prohibés et c’est à partir de cette date que l’axe des toitures fut placé parallèlement à la rue. Ces deux maisons à pignon dont la datation est incertaine (entre XIVème et XVIème siècle) sont dites à bois long car les poutres d’angle du colombage sont d’un seul tenant. Leur restauration minutieuse en 1967 a fait disparaître l’enduit qui, selon un édit de 1607, devait recouvrir les pans de bois intérieurs et extérieurs afin de limiter la propagation des incendies. Deux pastiches de boutiques de style médiéval signalées par les enseignes du Faucheur et du Mouton ont été reconstituées d’après des documents anciens.


Prenons la rue de Jouy, à droite la rue des Nonnains d'Yhères pour rejoindre l'hôtel de Sens.

13 rue François Miron
13 rue François Miron Atget

13, rue François-Miron
Atget - 1901
(Musée Carnavalet)

Hôtel de Sens

L’évêché de Paris étant sous la tutelle de l’archevêque de Sens,  l’archevêque Tristan Salazar se fit construire une résidence entre 1475 et 1507, à l’architecture mi-gothique, mi-Renaissance.

L’hôtel n’abrita pas que de pieux personnages. Il garde également le souvenir d’un bref séjour qu’y fit la reine Margot en 1605. Agée alors de cinquante-trois ans, elle n’est plus la belle jeune femme dont la beauté était célébrée par Ronsard et Montaigne. Bien que devenue énorme, elle continue d’avoir des aventures amoureuses et de surcroît avec de jeunes amants. Au moment où son amant Saint-Julien lui ouvre la porte de son carrosse, il meurt abattu par un rival jaloux âgé seulement de vingt ans, le comte de Vermont. Ce dernier, vite rattrapé, est  traîné devant la porte de l’hôtel de Sens où Marguerite hurle d’une fenêtre : « Qu’on le tue, ce meschant ! Voilà mes jarretières … qu’on l’étrangle ! » … Le malheureux fut décapité à la hache trois jours plus tard en face de l’hôtel de Sens qui, désormais maudit, fut abandonné par la Reine pour une autre résidence.

Délaissé puis vendu à la Révolution, l’hôtel abrita diverses petites industries après avoir été longtemps messagerie de diligences. Très abîmé, il fut racheté en 1911 par la ville de Paris. Sa remarquable restauration prit de nombreuses années (de 1934 à 1960) et la façade sur jardin dut être quasiment reconstruite. Il abrite à présent la bibliothèque Forney, spécialisée dans les beaux-arts, les arts décoratifs et graphiques, l’artisanat  et l’histoire des  techniques.


Prenons la rue de l'Ave Maria et tournons à gauche dans la rue des Jardins Saint-Paul.

Hôtel de Sens côté jardins
Hôtel de Sens rue du Figuier -
Hôtel de Sens depuis la rue de l'Ave-Maria
Atget - 1899
(BNF)

Hôtel de Sens depuis la rue de l'Ave-Maria
Atget - 1899
(BNF)

Rue des Jardins-Saint-Paul

Il est très difficile de comparer la rue des Jardins-Saint-Paul  telle qu'elle apparait sur la photo prise par Atget et celle que l'on voit de nos jours. La photo d'Atget montre une rue étroite bordée des deux côtés par des immeubles.

Aujourd'hui la rue est élargie, les immeubles sur la gauche, côté impair, ont été démolis. Et c’est la démolition en 1946 de ces immeubles devenus insalubres qui a fait apparaître un important tronçon de l'enceinte de Philippe-Auguste. A la place des immeubles détruits, on a construit un terrain de sports au pied de la muraille. La vue sur l’arrière de l’église Saint-Paul Saint-Louis est ainsi dégagée.
Un peu d'histoire pour mieux comprendre ...

Le nom de la rue ouverte au XIIIème siècle rappelle que des jardins sur lesquels la rue avait été ouverte aboutissaient jusqu'aux murs de l’enceinte de Philippe Auguste, bâtie il y a plus de 8 siècles (1190). La rue qui s’étendait de la rue de l’Ave-Maria à la rue Charlemagne suivait  à l’extérieur le tracé du rempart. Ce fragment de muraille, le plus important existant encore à Paris, a parfaitement été conservé. Car, servant de point d’appui solide, il fut intégré dans la construction du couvent des sœurs de l’Ave Maria puis plus tard servit de mur mitoyen entre le couvent et des immeubles d’habitation. Le petit lycée Charlemagne prit la place d’une partie du couvent démoli en 1868. Au tout début du XXème siècle, la muraille bien que cachée était connue grâce aux anciens plans. Et son côté externe réapparut lors de la démolition en 1946 des immeubles que l’on voit à gauche sur la photo prise par Atget.  Ce tronçon de la muraille, long de 60 mètres, et comportant deux tours, l’une au milieu de la rue et l’autre à l’angle de la rue Charlemagne, fut restauré en 1998 et un terrain de sport a  été aménagé à ses pieds. Pour avoir une idée du mur tel qu’il était au Moyen Age, il faut l’imaginer un peu plus haut et crénelé. 

Rue des Jardins Saint Paul au fond rue Charlemagne et église Saint PaulSaint-Louis
Vue du côté externe de la muraille de Philippe Auguste
Rue des Jardins Saint-Paul au fond rue Charlemagne et église Saint-Paul Saint-Louis Atget

Rue des Jardins-saint-Paul
Au fond, rue Charlemagne et
église Saint-Paul Saint-Louis
Atget - (Musée Carnavalet)

Vue du côté externe de la muraille de Philippe Auguste en 2005

Vue du côté externe de la muraille de Philippe Auguste en 2005
(Photo Le Marais - Parigramme)

Au bout de la rue des Jardins Saint-Paul, tourner à gauche dans la rue Charlemagne et à droite dans l'étroite rue du Prévôt.

Rue du Prévôt

Cette rue, large de 3 mètres, a gardé son étroitesse  typique des rues du Moyen Age. La photo prise par Atget témoigne de l’aspect sombre que devaient présenter nombre de ruelles anciennes avant leur destruction par Haussmann.

Les encoignures à l’angle de la rue Charlemagne permettaient d’effacer l’angle droit de la rue et ainsi de faciliter  le passage  des voitures.


Au bout de la rue du Prévôt, traverser la rue de Rivoli, prendre en face la rue Pavée et à gauche la rue du Roi de  Sicile. Continuer par la rue de la Verrerie et tourner à droite dans la rue des Archives.

Rue du Prévôt
Rue du Prévôt Atget

Rue du Prévôt
Atget - 1901
(Musée Carnavalet)

Cloître des Billettes, rue des Archives

La légende raconte qu’un juif, Jonathas, aurait profané une hostie, en 1290, le jour de Pâques. Après l’avoir percée d’un couteau d’où du sang aurait jailli, il l’aurait alors plongée dans un chaudron d’eau bouillante qui se métamorphosa en sang dont le flot s’échappa sous la porte de la maison. Les voisins  se seraient affolés et appelèrent les gens d'armes. Jonathas, arrêté, fût brûlé vif, ses biens et sa maison confisqués, sa femme Bélatine et ses enfants convertis.

Sur l’emplacement de la maison où « Dieu fut bouilli », un bourgeois de Paris, Rainier Flamingue, fit construire une chapelle confiée en 1299 par le roi Philippe le Bel aux Hospitaliers de la Charité Notre-Dame. On les surnomma les Billettes, probablement parce qu’ils portaient un scapulaire en forme de billette, qui est une pièce d’armoirie. Au XIVème siècle, leur église continua à prendre de l’extension et le cloître que nous voyons aujourd'hui fut construit après 1427. L’église, reconstruite sous Louis XV, fut affectée au culte luthérien par la Ville de Paris en 1812.  Avant de porter le nom de la rue des Archives, la vieille artère s’appela la rue « du Dieu bouilli » dont l’histoire circula sous plusieurs versions en Europe. L’accusation de profanations d’hosties contre les juifs a été un thème majeur de l’antisémitisme depuis le Moyen Age et fut perpétué pendant très longtemps. Ainsi par exemple, on peut la retrouver dans des scènes peintes par Paolo Ucello au XVème siècle sous le titre du miracle de l’hostie profanée, exposées à la Galerie nationale des Marches d’Urbino.

Cloître des Billettes
Cloître des Billettes Atget

Cloître des Billettes
Atget - 1898
(Musée Carnavalet)

Hôtel de Clisson - 58, rue des Archives

De la propriété d’Olivier de Clisson, nommé Connétable de France en 1380 après la mort de Du Guesclin, il subsiste la porte fortifiée, flanquée de deux tours en poivrière. Les deux médaillons gravés et la devise de Clisson « Pour ce qui me plet » ont été ajoutés au XIXème lors de la restauration des tourelles. Cette restauration permit de dégager les deux écussons peints que l’on peut voir sur le tympan du portail ; ils sont aux armes des Guise car l’hôtel fut racheté par le duc de Guise en 1553. Anne d’Este, mère d’Henri troisième duc de Guise dit le Balafré, décida de mettre la demeure au goût du jour et fit appel au Primatice, architecte et peintre italien, pour en faire  un palais fastueux.
L’hôtel devint pendant les guerres de religion le quartier général du parti catholique, d’où fut sans doute préparé la vengeance contre Coligny, soupçonné d’avoir été impliqué dans l’assassinat de  François de Guise, père du Balafré. Appelé par Catherine de Médicis dans la nuit du 24 août 1572 pour prendre la tête du massacre de la Saint Barthélémy, le duc de Guise put ainsi assouvir son désir de vengeance avec la défenestration de l’amiral.

Hôtel de Clisson
Hôtel de Clisson Atget

Hôtel de Clisson
Atget - 1898
(BNF)

Plus tard en 1700, François de Rohan, prince de Soubise, acheta l’hôtel qu’il fit complètement transformer en ne conservant que la porte fortifiée et la chapelle. L’architecte Delamair changea l’axe d’orientation de l’édifice dont l’immense cour d’honneur s’ouvre au 60, rue des Francs-Bourgeois.
Le magnifique hôtel de Soubise fut affecté aux Archives par Napoléon 1er en 1808 et, en 1867, Napoléon III y créa le musée de l’histoire de France afin d’exposer au public les documents des Archives les plus importants. La visite du musée des Archives Nationales donne également la possibilité d’admirer les superbes appartements de l’hôtel de Soubise.


Continuons rue des Archives jusqu'à la rue des Haudriettes à gauche. Continuer par la rue Michel le Comte et à droite rue Beaubourg. A droite rue au Maire jusqu'à la rue Volta.

3, rue Volta

Pendant très longtemps on a cru qu’il s’agissait de la plus vieille maison de Paris, jusqu’à ce que l’on retrouve  l’attestation d’un acte de vente de 1654. La plus ancienne maison de Paris est par conséquent celle de Nicolas Flamel, rue de Montmorency, que nous irons voir juste après. Qu’elle soit du XVIIème siècle et non comme on le pensait du XIVème, elle est incontestablement de structure médiévale avec sa façade à colombages et son rez-de-chaussée en pierre.

Vieille maison 3 rue Volta
Vieille maison et Vielle boutique 3 rue Volta Atget

Vieille maison et vieille boutique
3 rue Volta
Atget - 1901
(BNF)

L'ancienne boutique est aujourd'hui occupée par un restaurant chinois. La rue Volta abrite avec sa voisine la rue au Maire un petit quartier chinois. Quelque cent mille Chinois venus majoritairement de la ville de Wenzhou vinrent travailler en France pendant la première guerre Mondiale afin de remplacer les hommes partis au front. Beaucoup restèrent et s’installèrent dans ce quartier du Marais


Revenons sur nos pas rue Beaubourg pour rejoindre la rue de Montmorency, où se trouve la plus vieille maison de Paris.

51, rue de Montmorency

C’est donc la plus vieille maison de Paris, et longtemps considérée comme magique.
Nicolas Flamel, enlumineur et universitaire de renom, à qui l’on prêtait également des dons d’alchimiste, l’a fait construire en 1407. Elle est  entièrement en pierre, ce qui était rare au Moyen Age car seules les personnes fortunées en avaient les moyens. C’est la brusque fortune de Flamel, jusqu’alors libraire besogneux qui fit énormément jaser. La rumeur courut qu’il avait obtenu la pierre philosophale, lui permettant de « faire de l’or ».
J'ai lu une explication plus prosaïque sans qu'elle puisse être confirmée. Des juifs pourchassés lors de la révolte des Maillotins - ces bourgeois qui tuèrent à coups de maillet de plomb  gens du fisc et juifs -  auraient confié leur fortune à Nicolas Flamel qui aurait fait alors des placements avantageux et gardé pour  lui  une part des bénéfices…

En caractères gothiques, une longue inscription avec la date de construction de la maison  destinée à servir de refuge aux pauvres avec pour toute obligation cette prière à Dieu matin et soir pour le salut des trépassés :

«  Nous hommes et femmes laboureurs demourans ou porche de ceste maison qui fit faicte en l'an de grâce mil quatre cens et sept sommes tenus chascun en droit soy dire tous les jours une patenostre et l'Ave Maria en priant Dieu que de la grâce face pardon aux povres pécheurs trépassez. Amen »

Maison de Nicolas Flamel rue de Montmorency
Maison de Nicolas Flamel Atget - 1902  (BNF)

Maison de
Nicolas Flamel
Atget - 1902
(BNF)

Au bout de la rue de Montmorency, tournons à droite dans la rue Saint-Martin jusqu'au Musée des Arts et Métiers. 

Le Prieuré de Saint-Martin-des-Champs

Le clocher de l'église avant la restauration en 1913
Atget
(Ecole Nationale Supérieure des Beaux Arts)

Le clocher de l'église avant la restauration en 1913
Atget
(Ecole Nationale Supérieure des Beaux Arts)

C’est une des plus vieilles églises de Paris, injustement  méconnue. Le chevet, de facture romane, date du XIIème siècle. La tour crénelée, construite en 1273, que l’on peut voir un peu plus loin, à l’angle de la rue du Vert Bois et de la rue Saint-Martin, est un reste de l’immense enceinte du prieuré et se trouve dans la continuité du fort intéressant musée des Arts et Métiers, fondé en 1794. On y trouve une très riche collection qui comprend l’avion de Blériot, le pendule de Foucault, la machine à calculer de Pascal, la première caméra des frères Lumières, le métier à tisser de Jacquard, le plâtre original de la statue de la Liberté, pour ne citer que quelques-uns des objets et thèmes techniques et scientifiques qui y sont exposés.   

Prieuré Saint-Martin des Champs
clocher de l'église Saint Martin des Champs

Texte / Photos : Martine Combes

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