Métiers de Paris - Cris de Paris
Lorsque l’on doit rester chez soi, enfermés, confinés, nos sens sont désespérément à l’affût de ce qui se passe à l’extérieur et captent aussi bien les bruits que le silence inhabituel perçé des chants d’oiseaux. Le confinement a peut-être été l’occasion de lire ou relire des auteurs quelquefois oubliés sur les rayonnages de notre bibliothèque.
C’est ainsi que j’ai repris la lecture de Proust, en cette curieuse période de confinement, pas tant par ce qu’elle a été largement suscitée par les magazines rappelant que l’auteur avait vécu une partie de sa vie, confiné, en retrait du monde. Le retour à Proust a été plutôt suscité par le hasard de mes lectures à haute voix en tant que donneuse de voix, Paris, une Anthologie littéraire, de François Villon à Michel Houellebecq. Un des extraits choisis étant la Prisonnière, où Proust évoque les « Cris de Paris » des marchands ambulants.
Le Paris de Proust, à l’arrière plan de bien des pages de La Recherche, est celui des beaux quartiers des 7°, 8° et 16°, loin de ceux fréquentés par Atget, son contemporain photographe. Deux Paris s’opposent, l’un est le lieu de rendez-vous de la haute société, l’autre est le vieux Paris populaire. Il y a cependant des passages où Proust sait restituer des aspects populaires de Paris, notamment ceux des marchands, égalements photographiés par Atget, lui aussi à la recherche d’un Temps Perdu, celui d’un Paris disparu ou en train de disparaître inexorablement.
Je vous invite à une promenade dans un Paris très lointain, à une flânerie intérieure dans un Paris recomposé, où les petits métiers faisaient résonner de leurs cris les rues et les cours, si bien décrits par Proust dans La Prisonnière, titre oh combien adapté à la circonstance. (Avril/Mai 2020).
La Prisonnière - Les Cris de paris
Dehors, des thèmes populaires finement écrits pour des instruments variés, depuis la corne du raccommodeur de porcelaine, ou la trompette du rempailleur de chaises, jusqu’à la flûte du chevrier, qui paraissait dans un beau jour être un pâtre de Sicile, orchestraient légèrement l’air matinal, en une « ouverture pour un jour de fête ».
La Prisonnière – Proust
Marchand ambulant
"Certes, la fantaisie, l’esprit de chaque marchand ou marchande, introduisaient souvent des variantes dans toutes les paroles de toutes ces musiques que j’entendais de mon lit. Pourtant un arrêt rituel mettant un silence au milieu du mot, surtout quand il était répété deux fois, évoquait constamment le souvenir des vieilles églises."
Boulangère
Marchande de poissons
« Oh ! des huîtres, j’en ai si envie ! Heureusement, Albertine, moitié inconstance, moitié docilité, oubliait vite ce qu’elle avait désiré, et avant que j’eusse eu le temps de lui dire qu’elle les aurait meilleures chez Prunier, elle voulait successivement tout ce qu’elle entendait crier par la marchande de poissons :
« A la crevette, à
la bonne crevette,
j’ai de la raie toute en vie, toute en vie.
– Merlans à frire, à frire.
Il arrive le maquereau, maquereau frais, maquereau nouveau.
Voilà
le maquereau, mesdames, il est beau le maquereau.
A la moule fraîche et bonne, à la moule ! »
Marchand de jouets
… remplaçant la vendeuse de bonbons qui accompagnait d’habitude son air avec une crécelle, le marchand de jouets, au mirliton duquel était attaché un pantin qu’il faisait mouvoir en tous sens, promenait d’autres pantins, et sans souci de la déclamation rituelle de Grégoire le Grand, de la déclamation réformée de Palestrina et de la déclamation lyrique des modernes, entonnait à pleine voix, partisan attardé de la pure mélodie :
« Allons les papas, allons les mamans, contentez vos petits enfants ;
c’est moi qui les fais, c’est moi qui les vends,
et
c’est moi qui boulotte l’argent.
Tra la la la.
Tra la la lalaire, tra la la la la la la la.
Allons les petits ! »
Marchand de paniers
« L’émotion dont je me sentais saisi en apercevant la fille d’un marchand de vins à sa caisse ou une blanchisseuse causant dans la rue était l’émotion qu’on a à reconnaître des Déesses ; Depuis que l’Olympe n’existe plus, ses habitants vivent sur la terre. Et quand faisant un tableau mythologique, les peintres ont fait poser pour Vénus ou Cérès des filles du peuple exerçant les plus vulgaires métiers, bien loin de commettre un sacrilège, ils n’ont fait que leur ajouter, que leur rendre la qualité, les attributs divins dont elles étaient dépouillées. »
Derniers commentaires
C'est à nouveau un merveilleux voyage du Palais Royal à la Butte Montmartre... Merci Martine pour ces belles découvertes!
I hope I will have the time to run the course next weekend when im in Paris as a turist from denmark
L'enseigne de la Galerie du Chat était au 27, rue de Bièvre, magasin d'articles ayant pour thème le chat. L'enseigne a disparu depuis que le magasin a
déménagé au 68, bv de Port Royal.
Bonjour, je suis a la recherche de la rue de l´enseigne "la galerie du chat". Est-ce une galerie ou un restaurant-café ? L´enseigne correspond-elle a un lieu encore existant ? Merci à l´avance . Ma